Initialement prévues pour mutualiser les cadeaux, les cagnottes en ligne ont été propulsées sur la place publique, catalysant les engagements, les indignations et les émotions. Mais attention ! Selon les situations, leur traitement juridique ou fiscal n’est pas le même.
Soutenir les sinistrés de catastrophes naturelles ou humanitaires, sauver un bâtiment de la ruine, financer une opération du cœur, se mobiliser pour les familles de victimes : les cagnottes sont devenues un « observatoire privilégié des émotions collectives des Français » (1). Elles soulignent également les déficiences de la prise en charge publique (du matériel médical non remboursé, la reconstruction de Notre-Dame, le soutien aux soignants lors du premier confinement).
Les mouvements sociaux sont aussi concernés, les caisses de grèves étant souvent remplacées par des e-cagnottes. Le fait est que leurs bénéficiaires sont en général des particuliers, à tout le moins un cercle restreint de personnes, et plus rarement des organismes sans but lucratif (OSBL). Ces derniers peuvent recevoir des dons en franchise de droits de mutation à titre gratuit (DMTG) et peuvent être éligibles au régime du mécénat ce qui n’est pas le cas des premiers. La différence est de taille : une taxation de 60 % d’un côté, ou une réduction fiscale de 66 % de l’autre.
Cagnottes illégales
On trouve les cagnottes créées pour contribuer au paiement des frais de justice de personnes mises en cause par la justice, souvent à l’occasion de manifestations ou d’actions militantes. Ces initiatives sont limitées par l’article 40 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse : « Il est interdit d’ouvrir ou d’annoncer publiquement des souscriptions ayant pour objet d’indemniser des amendes, frais et dommages-intérêts prononcés par des condamnations judiciaires, en matière criminelle et correctionnelle. »
Une telle cagnotte ne peut donc servir qu’au paiement des frais de défense, et éventuellement pour se pourvoir devant une juridiction supérieure (2). Parfois, elles se heurtent à l’ordre public, comme celle qui avait été initiée pour soutenir un manifestant reconnu coupable de violences contre les forces de l’ordre. Ainsi, le tribunal judiciaire de Paris (3) a annulé la cagnotte, au visa de l’article 1162 du code civil : « Le contrat ne peut déroger à l’ordre public ni par ses stipulations ni par son but, que ce dernier ait été connu ou non par toutes les parties. »
Volonté du donateur
Face au risque de dérives, les plateformes assurent bannir les cagnottes incitant à la violence ou à la haine. La plateforme GoFundMe a mis en place une garantie pour rembourser les donateurs trompés. En effet, la volonté du donateur fait l’objet d’une protection renforcée par l’article 901 du code civil et la jurisprudence apprécie de façon extensive les notions d’erreur et de dol, lorsqu’il s’agit de protéger l’intégrité de son consentement (4).
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